MISE À JOUR : 13.06.2023
MISE À JOUR : 13.06.2023
REQUIN BLANC
REQUIN
BLANC
Carcharodon carcharias
Carcharodon carcharias
Beaucoup de gens sont surpris d’apprendre que le requin blanc fréquente la côte est du Canada et même le golfe et l’estuaire du Saint-Laurent. En fait, le requin blanc est observé plus fréquemment au Canada atlantique qu’en Colombie-Britannique.
Le requin blanc est sans aucun doute le requin le plus connu et le plus redouté au monde. Et bien que sa réputation de mangeur d’hommes soit exagérée, en grande partie à cause de films et de manchettes sensationnalistes, il s’agit néanmoins d’une espèce dangereuse qui attaque parfois les humains.
Dans l’Atlantique Nord, le requin blanc est présent de façon saisonnière dans toutes les provinces maritimes, à Terre-Neuve-et-Labrador et au Québec. Jusqu’à récemment, la majorité des observations et des prises accessoires se produisaient dans la baie de Fundy. De rares captures et rencontres visuelles ont également été signalées au large de la Nouvelle-Écosse et dans tout le golfe du Saint-Laurent. Un requin blanc a même été ramené à quai à Rivière-Portneuf dans l’estuaire du Saint-Laurent. Au cours de la dernière décennie, les signalements documentés ont considérablement augmenté dans tout le Canada atlantique et au Québec, où le grand requin blanc semble progressivement rétablir ses anciens terrains de chasse. Cependant, malgré cette augmentation apparente de la taille de la population, le requin blanc est toujours considéré comme une espèce en voie de disparition car ses effectifs restent relativement faibles et parce que sa survie est toujours menacée par l’activité humaine.
Aussi surprenant que cela puisse paraître pour certains, le requin blanc n’est pas nouveau venu dans ces régions, et sa présence établie depuis longtemps dans le Saint-Laurent n’est pas le résultat direct des changements climatiques. Au contraire, l’augmentation récente des observations dans tout le nord-ouest de l’Atlantique résulte plus probablement du statut protégé du requin blanc et de ses proies—les phoques—ainsi que de l’omniprésence des téléphones intelligents et des réseaux sociaux. Nous prévoyons que cette tendance se poursuivra aussi longtemps que le requin blanc sera une espèce protégée et que les humains prendront la mer.
¹ Vladykov, V. D., and R. A. McAlister. 1961. Preliminary list of marine fishes of Quebec. Le naturaliste canadien, 88(3): 17-113.
Ordre – Lamniformes
Famille – Lamnidae
Genre – Carcharodon
Espèce – C. carcharias
NOMS
NOMS
Noms communs : requin blanc, grand requin blanc
* L’appellation grand servait autrefois à dissocier l’espèce d’un autre requin qui s’appelait aussi—mais plus aujourd’hui—blanc. Il y avait donc le grand requin blanc et le lesser white shark, soit le requin longimane (Carcharhinus longimanus). Le requin longimane n’a jamais été appelé blanc ou petit blanc en français ainsi l’appellation grand requin blanc n’a jamais été nécessaire. C’est donc un adjectif désuet en anglais en plus d’être un calque inutile en français. Le grand requin blanc est maintenant passé de mode et abandonné par de nombreux chercheurs, dont l’Observatoire des requins du Saint-Laurent.
Noms communs anglais : white shark, great white shark, white pointer, white death
DESCRIPTION
DESCRIPTION
• Longueur moyenne de 3,5 à 5 mètres au Canada atlantique et au Québec.
• Couleur variant du gris plomb, gris brun ou noir sur le haut du corps, et blanc sur le ventre.
• Corps massif en forme de torpille.
• Grande nageoire dorsale triangulaire suivie d’une deuxième nageoire dorsale beaucoup plus petite.
• Nageoires pectorales avec extrémités noires sur la surface ventrale.
• Les lobes supérieur et inférieur de la queue sont presque de la même taille.
• Dents plates, triangulaires et dentelées sur les côtés.
• Présence saisonnière dans le Canada atlantique et au Québec.
TAILLE & APPARENCE
TAILLE & APPARENCE
Longueur maximale : jusqu’à 6,1 m¹
Longueur à maturité : 3.5-4 m, 4.5-5 m²
Poids : jusqu’à 1,970 kg³
Le requin blanc est la troisième plus grande espèce de requin et le plus gros poisson carnivore du monde. Bon nombre des individus qui fréquentent le Saint-Laurent sont de gros spécimens immatures. Un requin blanc mesurant 5,23 m (17,17 pi) a été capturé dans le golfe du Saint-Laurent au large de l’Île-du-Prince-Édouard en 1983. Son âge a été estimé à 17 ans sur la base des bandes de croissance de ses vertèbres, ce qui signifie que le requin aurait atteint une taille encore plus grande à maturité. Remarque: bien que le requin du Groenland rivalise ou dépasse le requin blanc en longueur, le requin blanc a jusqu’à deux fois sa circonférence et sa masse.
« Il ne fait aucun doute que Carcharodon carcharias dépasse 6,1 m de longueur, mais il n’existe pas encore d’observation authentifiée d’une telle taille. »
— Randall, 1987
La coloration et la répartition de couleurs du requin blanc lui permettent de se fondre dans son environnement et d’attaquer ses proies sans être vu. Son apparence physique conduit également à de fréquents cas de fausse identité. En raison de la similitude de sa nageoire dorsale et de sa taille, le requin pèlerin passe souvent pour le requin blanc dans l’Atlantique Nord. De même, le requin-taupe commun est fréquemment signalé comme un requin blanc juvénile dans le Saint-Laurent.
(ICI-BAS) Le requin blanc capturé accidentellement à 20 km au large d’Alberton (Î.-P.-É.) en 1983, est le plus gros spécimen jamais mesuré avec précision au Canada et l’un des plus gros au monde. Les restes de deux marsouins communs et de plusieurs morues, qui ont probablement été capturées dans le filet, ont été retrouvés dans l’estomac du requin.
¹ California Fish and Game, 73 (3): 163–168, figs 1–3.
² Compagno, L., Dando, M., Fowler, S. 2005. Sharks of the World. Collins, 368 p.
³ Pregnant White Sharks and Full-Term Embryos from Japan. In: Klimley, A.P. & Ainley, D. (Eds.) Great White Sharks. The biology of Carcharodon carcharias: 139–155.
Refutation of lengths of 11.3, 9.0, and 6.4 m. attributed to the white shark, Carcharodon carcharias. DENTITION
DENTITION
Les dents du requin blanc adulte sont grandes, triangulaires et dentelées. Les dents de la mâchoire inférieure et des juvéniles sont légèrement plus étroites. Après avoir mordu dans sa proie, le requin blanc secoue la tête d’un côté à l’autre pour scier des morceaux de chair.
En 2008¹, une équipe de scientifiques a déterminé que la puissance de la mâchoire d’un requin blanc de 3 324 kg était de 18 216 newtons (1 858 kgm / s²) ².
Détail : Le requin blanc n’est pas associé à la morsure dite du « tire-bouchon » qui a été rapportée par les médias. En fait, nous ne pensons pas que ce type de blessure spécifique soit causé par un requin. Voir l’éditorial Qui est le tueur à tire-bouchon ? pour plus de détails.
¹ Wroe, S., Huber, D. R., Lowry, M., McHenry, C., Moreno, K., Clausen, P., Ferrara, T. L., Cunningham, E., Dean, M. N., Summers, A. P. 2008. Three-dimensional computer analysis of white shark jaw mechanics: How hard can a great white bite? Journal of Zoology. 276 (4): 336–342.
² The kilogram-meter per second (kg·m/s or kg·m·s–1) is the standard unit of momentum . Reduced to base units in the International System of Units (SI), a kilogram-meter per second is the equivalent of a newton-second (N·s), which is the SI unit of impulse.
DISTRIBUTION
DISTRIBUTION
Le requin blanc possède l’une des aires de répartition les plus larges de toutes les espèces de requin. On le trouve des régions subarctiques jusqu’aux tropiques. Dans l’océan Atlantique, la répartition du requin blanc s’étend de l’île de Terre-Neuve à la Floride. Il a été documenté aussi loin à l’ouest que Rivière-Portneuf¹ dans l’estuaire du Saint-Laurent, à moins de quatre heures de la ville de Québec. Le requin blanc s’aventure régulièrement² dans les eaux peu profondes le long du rivage à la recherche de mammifères marins tels que les phoques, ce qui le rapproche des endroits où les riverains et vacanciers se livrent à des activités nautiques.
Des variations dans les migrations saisonnières de ses proies, l’augmentation du nombre de phoques, ainsi que l’omniprésence de plaisanciers et de pêcheurs équipés de téléphones intelligents, peuvent expliquer en partie l’augmentation apparente des observations du requin blanc dans le Saint-Laurent. La plus grande concentration de requins blancs le long de la côte Est peut également entraîner l’arrivée d’un plus grand nombre d’individus dans le golfe du Saint-Laurent à mesure qu’ils s’étalent pour éviter les conflits et ainsi rétablir l’espèce dans son aire de répartition traditionnel.
Jusqu’à récemment, le requin blanc apparaissait normalement dans le Saint-Laurent pendant une brève période du milieu à la fin de l’été. Or, ses excursions saisonnières dans le golfe et l’estuaire réchauffés par les changements climatiques se produisent maintenant d’au moins juillet à octobre.
(ICI-BAS) Répartition provisoire du requin blanc, Carcharodon carchariasdans le Saint-Laurent et le Canada atlantique, d’après les recherches de l’Observatoire des requins du Saint-Laurent. Les observations de requins blancs sont récemment devenues si fréquentes que seuls des cas historiques et sélectionnés sont affichés pour illustrer l’aire de répartition globale. Cette carte est régulièrement mise à jour avec des données nouvelles et historiques. La carte n’inclut pas les données des États-Unis, à l’exception des cas limites. Pour soumettre des observations ou des captures supplémentaires, veuillez nous contacter. Cliquez sur les icônes pour les détails des observations.
PROIES
PROIES
Le requin blanc est un prédateur opportuniste qui mange à peu près tout ce qui se trouve sur son chemin, mort ou vivant.
Contenus stomacaux vérifiés
Poissons : (liste partielle) saumon de l’Atlantique, merluche, flétan, maquereau, thon, autres requins et raies.
Mammifères : pinnipèdes (phoques), marsouins, dauphins, grands cétacés (généralement morts).
Others: birds, sea turtles.
PRÉDATEURS
PRÉDATEURS
Le seul prédateur confirmé du requin blanc est l’orque (Orcinus orca), qui a été observée à plusieurs reprises chassant et tuant des requins blancs à divers endroits. Bien que l’orque soit historiquement² connue pour fréquenter le golfe et l’estuaire du Saint-Laurent, sa présence au cours des dernières années³ a été rare et sporadique, et principalement limitée à la partie supérieure du golfe.
Comme le requin blanc est également rare et que la plupart des rencontres fortuites auraient lieu à la limite nord de son aire de répartition, les incidents de prédation par les orques dans le Saint-Laurent sont probablement rares ou inexistantes.
¹ Jorgensen, Salvador & Anderson, Scot & Ferretti, Francesco & Tietz, James & Chapple, Taylor & Kanive, Paul & Bradley, Russell & Moxley, Jerry & Block, Barbara. 2019. Killer whales redistribute white shark foraging pressure on seals. Scientific Reports. 9. 10.1038/s41598-019-39356-2.
² Vladykov, V.D. 1944. Études sur les mammifères aquatiques III. Chasse, biologie et valeur économique du marsouin blanc ou beluga (Delphinapterus leucas) du fleuve et du golfe St Laurent. Dept. Pêcheries Prov. Québec. 194 pp.
³ Wenzel, Frederick & Sears, R. 1988. A note on killer whales in the Gulf of St. Lawrence, including an account of an attack on a minke whale. Rit Fiskideild. 11. 202-204.
REPRODUCTION
REPRODUCTION
On sait peu de choses sur la reproduction du requin blanc. Il est ovovivipare et atteint sa maturité sexuelle vers 30 ans (26 ans pour les mâles et 36 ans pour les femelles)¹. Bien que la naissance n’ait jamais été observée, la gestation durerait environ 12 mois. Les femelles donnent naissance à 4 à 14 petits mesurant environ 135 à 151 cm à la naissance².
¹ Natanson Lisa J., Skomal Gregory B. (2015) Age and growth of the white shark, Carcharodon carcharias, in the western North Atlantic Ocean. Marine and Freshwater Research 66, 387-398.
² Castro, J. I. 2011. The Sharks of North America. Oxford University Press, 613 p.
ESPÉRANCE DE VIE
ESPÉRANCE DE VIE
Une étude¹ publiée en 2014 a démontré que les requins blancs grandissent plus lentement et vivent plus longtemps qu’on ne le pensait auparavant. Les estimations de l’âge et du taux de croissance de la population du nord-ouest de l’Atlantique ont été calculées à partir du dénombrement des bandes vertébrales et de la datation au radiocarbone sur les vertèbres de huit spécimens (quatre mâles et quatre femelles). Les estimations d’âge atteignaient jusqu’à 40 ans pour la plus grosse femelle (526 cm) et 73 ans pour le plus gros mâle (493 cm). Bien que cela ferait du requin blanc l’un des poissons chondrichtyens (requins, raies et chimères) les plus âgés, il est encore loin de l’espérance de vie du vénérable requin du Groenland.
¹ Natanson Lisa J., Skomal Gregory B. (2015) Age and growth of the white shark, Carcharodon carcharias, in the western North Atlantic Ocean. Marine and Freshwater Research 66, 387-398.
² Castro, J. I. 2011. The Sharks of North America. Oxford University Press, 613 p.
ATTAQUES
ATTAQUES
Selon le Registre canadien des attaques de requins, le requin blanc a été impliqué ou soupçonné dans neuf incidents confirmés avec des humains au Canada. Le requin blanc aurait également attaqué des canots Mi’kmaqs à l’époque préhistorique. Jusqu’en 2023, la plupart des affrontements ont impliqué de petits bateaux de pêche dans les Maritimes et à Terre-Neuve au cours du siècle dernier. Dans un incident, un homme est mort de noyade après qu’un requin blanc eut attaqué son doris au large du Cap-Breton en 1953. Une personne aurait été mordue par un requin blanc au large de l’île Margaree dans le golfe du Saint-Laurent en 2021, lors du seul incident connu de ce genre. Malheureusement, ce n’est peut-être qu’une question de temps avant qu’un nombre croissant de requins blancs et d’humains ne partageant les eaux côtières, combiné aux variables physiques défavorables telles qu’une mauvaise visibilité et la proximité d’espèces de proies régulières, c’est-à-dire le fait d’être au mauvais endroit à la au mauvais moment, provoque davantage d’incidents avec des requins blancs au Canada atlantique et au Québec.
¹ Gallant, J. (2022. 26 juillet). Registre canadien des attaques de requins (1ère éd.). Observatoire des requins du Saint-Laurent. https://geerg.ca/fr/attaques-requins
PÊCHERIES
PÊCHERIES
Aucune. Bien qu’il n’y ait pas de pêche dirigée pour le requin blanc au Canada, plusieurs spécimens ont néanmoins été capturés accidentellement depuis le début de la tenue de registres au 19e siècle.
STATUT
STATUT
Le requin blanc est répertorié en tant qu’espèce menacée par le COSEPAC (Comité sur la situation des espèces en péril au Canada).
Jeffrey Hay Gallant, MSc, est le fondateur et directeur scientifique de l’Observatoire des requins du Saint-Laurent et chercheur doctorant à l’UQAM. Il a fait sa première observation de requin à Peggy’s Cove en 1975, sa première plongée avec un requin à Halifax en 1992, codirigé les premières plongées en cage au Canada en 2000, et a été la première personne à filmer un requin du Groenland nageant librement en 2003.