DERNIÈRE MISE À JOUR : 21.10.2023

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REQUIN DU GROENLAND

REQUIN DU GROENLAND

Somniosus microcephalus

Somniosus microcephalus

Le requin du Groenland est le plus grand membre de la famille des Somniosidae. C’est le deuxième plus grand requin carnivore¹ après le requin blanc et c’est le plus gros poisson de l’Arctique. C’est aussi l’animal vertébré qui vit le plus longtemps avec une espérance de vie d’au moins 272 ans². Son aire de répartition s’étend de l’océan Arctique et de l’Europe du Nord au 32e parallèle nord de l’océan Atlantique. Malgré son apparence léthargique, c’est un prédateur capable de courtes accélérations et, dans certaines conditions, il peut chasser les phoques et même de gros mammifères, dont le béluga.

Le requin du Groenland est très rarement observé en raison de son habitat bathybenthique inaccessible aux plongeurs. Les premières images sous-marines d’un spécimen vivant ont été prises dans l’Arctique en 1995, et les premières images d’un requin du Groenland nageant librement dans des conditions naturelles³ ont été filmées par le GEERG dans l’estuaire du Saint-Laurent en 2003.

¹ De même longueur que le requin blanc mais environ la moitié de la circonférence.
² Nielsen, J., Hedeholm, R. B., Heinemeier, J., Bushnell, P. G., Christiansen, J. S., 2815 Olsen, J., et al. (2016). Eye lens radiocarbon reveals centuries of longevity in the Greenland shark (Somniosus microcephalus). Science 353, 702–704.
³ Observation non invasive des requins menée sans l’utilisation d’attractifs, de capture ou de contention. Toutes les rencontres initiées et terminées par les requins.

Ordre – Lamniformes
Famille – Somniosidae
Genre – Somniosus
Espèce – S. microcephalus

NOMS

NOMS

Noms communs : Laimargue, laimargue du Groenland, laimargue atlantique, requin du nord, requin noir, requin dormeur, requin de fond, requin de glace.

Noms en inuktitut : Skalugsuak, Ekalugssuaq, Iqalugjuaq.

Noms communs anglais : Sleeper shark, ground shark, grey shark, gurry shark.

Nom scientifique : Somniosus microcephalus* (Bloch & Schneider, 1801) — Somniosus: du latin [somnus] + [osus] = sommeil (plein de); microcephalus : micro + grèque [kephalē] = petite tête ; Signification : *Dormeur à petite tête.

Qu’est-ce qu’il y a dans un nom ?

Qu’est-ce qu’il y a dans un nom ?

Malgré son appellation, le requin du Groenland n’est pas endémique au Groenland, et il n’est pas rare non plus de le trouver ailleurs. Il est aussi bien chez lui dans le Saint-Laurent et le Saguenay que dans l’océan Arctique.

DESCRIPTION GÉNÉRALE

DESCRIPTION GÉNÉRALE

• Longueur moyenne de 3 à 5 mètres, mais peut atteindre jusqu’à 7 mètres.
• Couleur marbrée variant du brun, gris violacé, gris ardoise au noir.
• Peau portant souvent des marques blanches causées par des empêtrements ou l’accouplement. Offre peu de résistance lorsque capturé.
• Première nageoire dorsale en retrait et légèrement plus grande que la seconde.
• Pas d’épine devant les nageoires dorsales et la pointe arrière est détachée du dos.
• Pas de nageoire anale.
• Nageoire caudale (queue) asymétrique avec le lobe supérieur légèrement plus grand.
• Présence permanente dans le Canada atlantique et au Québec, y compris dans l’estuaire du Saint-Laurent et le fjord du Saguenay. Seul requin tolérant les eaux arctiques à l’année.

3 à 5 m au Canada atlantique et au Québec

Teeth are large, triangular and serrated unlike any other shark species in the St. Lawrence.
JAWS
Les yeux du requin du Groenland sont généralement dépourvus du parasite Ommatokoita elongata.
PARASITE OCULAIRE
Les denticules réduisent la traînée et la turbulence, ce qui permet au de nager plus furtivement.
DENTICULES DERMIQUES
Carène unique sur le pédoncule caudal contrairement au requin taupe qui en a deux.
CARÈNE CAUDALE
Le rostre blanchi est un signe d'abrasion répétée résultant de la recherche de nourriture sur le fond marin.
ROSTRE BLANC

DISTRIBUTION

DISTRIBUTION

La distribution du requin du Groenland s’étend de l’océan Arctique et de l’Europe du Nord jusqu’au 32e parallèle nord de l’océan Atlantique, y compris l’estuaire du Saint-Laurent. C’est l’un des deux seuls requins (avec le requin dormeur du Pacifique, Somniosus pacificus) connus pour tolérer les températures arctiques toute l’année. Au Québec, sa présence a été signalée dans le fjord du Saguenay, et elle a également été observée dans le cours inférieur de la baie d’Hudson (Baie-James) (Gallant, données non publiées).

Le requin du Groenland habite des environnements d’eau froide (-1,6 °C à 16,1 °C)¹ bien que les variations saisonnières déterminent sa migration vers le haut ou vers le bas de la colonne d’eau. En été, il passe plus de temps en profondeur là où l’eau est la plus froide. En hiver, il monte souvent jusqu’à la couche de surface recouverte de glace, qui est plus froide que l’eau du fond marin.

Saint-Laurent : Bien que Somniosus microcephalus soit communément appelé le requin du Groenland, sa présence dans le golfe du Saint-Laurent, documentée depuis près de deux siècles, n’est ni récente ni liée aux changements climatiques.

Golfe du Mexique : Les tests ADN² contredisent la capture signalée d’un requin du Groenland dans le golfe du Mexique en 2013. Le requin capturé par la Florida State University était soit Somniosus pacificus, soit un requin dormeur hybride.

Remarque : Parce qu’il est pratiquement impossible de différencier visuellement les espèces de requins dormeurs et que leurs distributions se chevauchent, les observations signalées de requins du Groenland à partir de submersibles et de drones sous-marins ne peuvent pas être confirmées.

(CI-DESSOUS) Répartition mondiale provisoire du requin du Groenland, Somniosus microcephalus, d’après les recherches de l’Observatoire des requins du Saint-Laurent. Seuls les cas historiques et sélectionnés sont affichés pour illustrer la plage globale. Cette carte est régulièrement mise à jour avec des données nouvelles et historiques. Pour soumettre des observations ou des captures supplémentaires, veuillez nous contacter. Cliquez sur les icônes pour les détails de l’observation.

DENTITION

DENTITION

La dentition du requin du Groenland détermine sa technique d’alimentation. Les dents supérieures, pointues mais non dentelées, permettent au requin de fixer sa nourriture. Les dents du bas, larges et incurvées latéralement, servent à tailler la proie en balançant la tête dans un mouvement circulaire. Ce faisant, le requin découpe un « bouchon » rond de chair de sa victime lorsqu’elle est trop grosse pour être avalée entière. Ce comportement a été enregistré sur film par le Dr George Benz sur l’île de Baffin. Les dents supérieures sont au nombre de 48 à 52 tandis que les dents inférieures sont au nombre de 50 à 52. Les petites proies qui rentrent dans la bouche du requin sont simplement aspirées par le fond.

Remarque : La plaie documentée en forme de bouchon mentionnée ci-dessus ne doit pas être associée à la plaie dite « en tire-bouchon » qui a été rapportée par les médias et dans un film documentaire en 2010. La plaie en tire-bouchon sur les phoques est plus probablement causée par d’autres phoques¹ .

¹ Brownlow A, Onoufriou J, Bishop A, Davison N, Thompson D (2016) Corkscrew Seals: Grey Seal (Halichoerus grypus) Infanticide and Cannibalism May Indicate the Cause of Spiral Lacerations in Seals. PLoS ONE 11(6): e0156464. doi:10.1371/journal.pone.0156464

PEAU

PEAU

La peau du requin du Groenland est couverte de denticules dermiques, qui ressemblent plus à des dents qu’à des écailles de poisson. Les denticules réduisent la traînée et la turbulence, ce qui permet au requin de nager plus furtivement. Les denticules sont très pointus. Les plongeurs doivent donc éviter tout contact intentionnel ou accidentel avec un requin du Groenland car les denticules peuvent endommager ou même percer une combinaison étanche.

PROFONDEUR

PROFONDEUR

Le requin du Groenland a été observé visuellement depuis la surface (0 m) jusqu’à 2 200 m¹ de profondeur près de l’épave du SS Central America (enregistré par un drone sous-marin à 260 km à l’est du cap Hatteras) en 1988². La pression à l’emplacement au large de la Caroline du Nord était de 3 203 PSI (221 BAR), ce qui dépasse la limite de fonctionnement sûre de nombreuses bouteilles de plongée. À titre de comparaison, la pression à l’intérieur des pneus de la plupart des voitures se situe entre 32 et 35 PSI. Un requin dormeur, espèce inconnue, a été observé à 2 774 m de profondeur au large du Brésil en 2012.

¹ L’espèce de requin dormeur observée à 2 200 m (1998) n’est pas confirmée bien qu’il soit généralement supposé être un requin du Groenland en raison de l’emplacement.
² Herdendorf, C. E., and Berra, T. M. (1995). A Greenland shark from the wreck of the SS Central America at 2,200 meters. Trans. Am. Fish. Soc. 124, 950–953.

VITESSE DE NAGE

VITESSE DE NAGE

Le requin du Groenland est l’un des requins nageant le plus lentement au monde. En fait, nous avons souvent observé des requins du Groenland planant au-dessus du fond, presque immobiles, mais à quelle vitesse nage-t-il vraiment ? Sur la base de nos centaines d’observations visuelles de requins du Groenland nageant librement, et après avoir soigneusement analysé des heures d’images vidéo ainsi que plusieurs mois de données de télémesure, nous avons déterminé que la vitesse de nage moyenne du requin du Groenland dans l’estuaire du Saint-Laurent est de 0,3 mètre par seconde ou 1,08 km/h (0,67 mph)¹. Nous avons également observé des vitesses de pointe allant jusqu’à 1 mètre par seconde, soit 3,6 km/h (2,2 mph), lors d’opérations de marquage par des plongeurs autonomes sur des requins du Groenland non retenus.

Requin du Groenland dans l’estuaire du Saint-Laurent. Vidéo © ORS | Jeffrey Gallant et Chris Harvey-Clark. Tous droits réservés.

Une vitesse de pointe publiée de 0,7 m/s (1,7 mph)² pour cette espèce a été mesurée dans des circonstances normales lorsque les requins marqués avec des accéléromètres n’étaient pas piqués par des plongeurs équipés de lances. Et bien qu’il faille parfois « sept secondes pour qu’un seul balayage complet de la queue propulse le requin vers l’avant » (BBC Nature, 22 juin 2012), cela ne s’applique pas à la vitesse de nage moyenne d’un requin du Groenland, comme le montre clairement la séquence vidéo ci-jointe.

¹ Gallant, Jeffrey J., Marco A. Rodríguez, Michael J. W. Stokesbury, and Chris Harvey-Clark. (2016). Influence of environmental variables on the diel movements of the Greenland Shark (Somniosus microcephalus) in the St. Lawrence Estuary. Canadian Field-Naturalist 130(1): 1-14.
² Watanabe, Y. Y., Lydersen, C., Fisk, A. T., and Kovacs, K. M. (2012). The slowest fish: Swim speed and tail-beat frequency of Greenland sharks. Journal of Experimental Marine Biology and Ecology 426–427: 5-11.

Requin le plus lent du monde ?

Requin le plus lent du monde ?

Le requin du Groenland n’est en aucun cas une voiture de course, mais il y a eu de nombreuses occasions où le surmenage physique nous a empêchés de suivre un requin pendant plus de 1 à 2 minutes en plongée sous-marine. À moins que le requin du Groenland ne soit comparé uniquement à d’autres espèces de requins ou à des poissons de même taille, et pour toutes les raisons énoncées ci-dessus, nous ne pensons donc pas qu’il soit le requin le plus lent du monde, encore moins le poisson le plus lent du monde.

En ce qui concerne les autres espèces en lice pour le titre de requin le plus lent du monde—et sans tenir compte des mouvements explosifs—une étude¹ a démontré que les requins-anges du Pacifique, Squatina californica, parcouraient des distances ne dépassant pas 30 à 75 km sur une période de trois mois, soit au maximum 7,3 km en une seule nuit, tandis qu’un requin du Groenland marqué par le GEERG en 2005 a parcouru 26 km en seulement 29 heures². Les deux espèces utilisent leurs spiracles³ pour aider à respirer et les deux espèces ont montré une fidélité au site (philopatrie) sur une période de plusieurs mois, voire années. Certes, les requins-anges ne migrent pas et ne sont pas les nageurs les plus actifs, ce peut donc être une comparaison injuste. Alors qu’en est-il des autres requins dormeurs et des roussettes des grands fonds comme le requin lanterne nain et les requins gulper ? N’importe lequel d’entre eux pourrait gagner—ou perdre ?—par un museau !

Jusqu’à récemment, peu de personnes dans l’industrie du divertissement ou dans les médias s’intéressaient au requin du Groenland prétendument sans personnalité. En l’absence de preuves définitives ou d’une définition scientifique claire, le titre de « requin le plus lent du monde » pourrait donc être une tentative d’attirer l’attention des médias sur cette espèce négligée. La rigueur scientifique nous empêche de faire une déclaration aussi audacieuse.

¹ Fouts, W.R. & Nelson, D.R. (May 7, 1999). “Prey Capture by the Pacific Angel Shark, Squatina californica: Visually Mediated Strikes and Ambush-Site Characteristics”. Copeia. American Society of Ichthyologists and Herpetologists. 1999(2): 304–312.
² Gallant, Jeffrey J., Marco A. Rodríguez, Michael J. W. Stokesbury, and Chris Harvey-Clark. (2016). Influence of environmental variables on the diel movements of the Greenland Shark (Somniosus microcephalus) in the St. Lawrence Estuary. Canadian Field-Naturalist 130(1): 1-14.
³ Contrairement aux nombreuses espèces de requins qui doivent constamment nager pour forcer l’oxygène à travers leurs fentes branchiales, certains requins peuvent rester immobiles pendant de longues périodes tout en utilisant leurs spiracles pour extraire l’oxygène de l’eau. Parmi ceux-ci, le requin du Groenland possède des spiracles inhabituellement grands qui lui permettent d’absorber de l’oxygène tout en nageant à vitesse réduite, soit pour chasser furtivement, soit pour conserver de l’énergie dans son environnement proche du point de congélation.

PROIES

PROIES

Le requin du Groenland est un prédateur opportuniste qui mange à peu près tout ce qui croise son chemin, mort ou vivant. Cependant, nous pensons qu’il s’agit avant tout d’un charognard.

Contenu de l’estomac vérifié

Poissons : omble chevalier, flétan atlantique, saumon atlantique, capelan, morue, lycodes, anguille, flétan noir (turbot), grenadier, aiglefin, hareng, poule de mer, goberge, chaboisseaux, sébastes, loup tacheté, raies et autres requins.

Mammifères : béluga, narval, marsouin, phoque et autres animaux, y compris des restes de chien, de cheval, de renne, d’orignal et d’ours blanc.

Invertébrés : crustacés, gastéropodes, méduses, poulpes, étoiles de mer (étoiles du soleil et ophiures), calmars, oursins, buccins et autres escargots.

Autres : restes d’oiseaux, varech.

Proies non vérifiées

Mammifères : Le requin du Groenland aurait été vu par des scientifiques, chassant le caribou à la manière d’une embuscade de crocodile à l’embouchure de rivières de l’Arctique canadien. Remarque : Bien que cette anecdote jadis hautement médiatisée provienne d’une source crédible, elle n’a jamais été prouvée. Plus que probablement, le requin du Groenland se nourrit de caribous noyés tombés à travers la glace lors de sa migration.

Contrairement à ce qui avait été rapporté par les médias en 2008 et propagé depuis via les réseaux sociaux, le réchauffement climatique a également peu de chances d’aider le requin du Groenland à attaquer les ours.

Reuters: Polar bear eaten by shark. Who’s top predator?

« Il y a peu de chances qu’un requin du Groenland pour chasser un ours blanc adulte vivant à moins qu’il ne soit blessé ou gravement malade. Le requin du Groenland ne peut tout simplement pas se permettre le risque de blessure ni la dépense d’énergie nécessaire pour tuer un animal aussi gros et dangereux, avec ou sans l’aide du réchauffement climatique. Il y a des proies beaucoup plus faciles à trouver. »
— Jeffrey Gallant | Observatoire des requins du Saint-Laurent

PRÉDATEURS

PRÉDATEURS

Le seul prédateur confirmé du requin du Groenland est le cachalot (Physeter macrocephalus). Le GEERG a enregistré deux occurrences d’un cachalot présentant un comportement de prédation en présence du requin du Groenland dans l’estuaire du Saint-Laurent. Malheureusement, la même baleine, connue sous le nom de Tryphon, est décédée d’un enchevêtrement dans un engin de pêche en 2009.

Une enquête plus approfondie menée par le GEERG (2009) a conduit à la découverte d’un autre indicateur potentiel que ce cachalot particulier aurait pu se nourrir de requins du Groenland pendant plusieurs années.

L’analyse des photos a révélé que les dents de Tryphon étaient gravement érodées par l’abrasion. La même anomalie dentaire a été observée dans un groupe d’orques (Orcinus orca) se nourrissant¹ de requins dormeurs du Pacifique (Somniosus pacificus) au large de la Colombie-Britannique en 2008. Le requin dormeur du Pacifique est pratiquement identique au requin du Groenland.

On pense que les orques et les cachalots se nourrissent de requins dormeurs principalement pour la grande quantité d’huile trouvée dans leur foie. Cependant, les chasseurs doivent d’abord déchiqueter leurs proies avec leurs dents qui sont ainsi érodées par les denticules acérés recouvrant la peau du requin.

Se nourrir de requins de cette manière sur une période de plusieurs années pourrait accélérer l’usure des dents, transformant ainsi les dents normalement acérées du prédateur en moignons arrondis.

¹ Ford, J.K.B., G.M. Ellis, C.O. Matkin, M.H. Wetklo, L.G. Barrett-Lennard, and R.E. Withler. 2011a. Shark predation and tooth wear in a population of northeastern Pacific killer whales. Aquat. Biol. 11: 213-224.
(CI-DESSUS DANS LE SENS HORAIRE) Cachalot Tryphon aux dents érodées (© René Trépanier). Une dent de Tryphon (© GREMM). Orque aux dents érodées jusqu’à la ligne des gencives, exposant la pulpe (Robin Abernethy | MPO). (CI-DESSOUS) Écholocalisation de Tryphon à proximité immédiate de requins du Groenland (© ORS | Jeffrey Gallant)

REPRODUCTION

REPRODUCTION

Peu de recherches ont été faites sur la reproduction du requin du Groenland bien qu’on pense qu’il atteint la maturité sexuelle à l’âge de 156 ± 22 ans¹. Comme la femelle donne naissance à au moins 10 petits à la fois, certains chercheurs pensent qu’elle est vivipare : ses œufs se développent et éclosent à l’intérieur de la femelle où les petits sont nourris par un placenta. Le requin du Groenland est considéré par d’autres comme ovovivipare (viviparité aplacentaire) : ses œufs se développent et éclosent également à l’intérieur de la femelle, mais il n’y a pas de placenta. Les petits se nourrissent donc les uns des autres alors peu survivent jusqu’à la naissance. Bien que l’accouplement et la naissance n’aient jamais été observés, on pense que les nouveau-nés mesurent environ 40 cm.

Les femelles observées par le GEERG dans le Saint-Laurent portent majoritairement des cicatrices d’accouplement sur leur région caudale. Lorsque le mâle décide de s’accoupler, il mord la femelle pour la faire soumettre. Heureusement pour la femelle, sa peau est deux fois plus épaisse que celle du mâle.

¹ Nielsen, J., Hedeholm, R. B., Heinemeier, J., Bushnell, P. G., Christiansen, J. S., 2815 Olsen, J., et al. (2016). Eye lens radiocarbon reveals centuries of longevity in the Greenland shark (Somniosus microcephalus). Science 353, 702–704.

ESPÉRANCE DE VIE

ESPÉRANCE DE VIE

Le proverbe finlandais selon lequel « l’âge ne donne pas la sagesse, il ne fait que ralentir » peut avoir une part de vérité chez le requin du Groenland. Avec une vitesse de croisière moyenne de 0,3 m/sec, le requin du Groenland est en effet un nageur très détendu. Son taux métabolique inhabituellement lent peut être attribué en partie à son environnement de vie glacial, ce qui peut également aider à expliquer la dernière découverte¹ sur ce mystérieux prédateur nordique.

Jusqu’à récemment, le vieillissement du requin du Groenland était impossible à estimer car il n’a pas de bandes de croissance vertébrales—comptées comme des anneaux sur un arbre—comme c’est le cas pour de nombreuses autres espèces de requins. Par conséquent, la détermination de son âge nécessiterait la capture et la mesure d’un chiot nouveau-né, suivies d’une recapture et d’une mesure périodiques jusqu’à la fin de sa vie naturelle. Le faire dans des conditions contrôlées—aucun requin du Groenland n’a jamais été gardé en captivité plus d’un mois—ne refléterait pas le taux de croissance naturel d’un requin vivant dans un environnement océanique, et une étude dans la nature sur une longue période, disons 200 années, nécessiterait plusieurs générations de chercheurs ainsi qu’un système de suivi extrême et continu, qui n’existe pas encore.

Même aujourd’hui, il existe très peu d’informations sur les requins recapturés, et le seul article scientifique contenant des données de recapture fiables date de plus de cinquante ans. Dans cette étude¹, un requin capturé et marqué au large du Groenland en 1936 a été recapturé en 1952. En 16 ans, la longueur du requin n’avait augmenté que de huit centimètres, soit 0,5 cm par an. Deux rapports moins fiables dans le même article obtenus à partir de requins recapturés après deux et 14 ans suggèrent des taux de croissance ne dépassant pas 1,1 cm par an, soit environ 0,3 m par 30 ans. En supposant que le taux est constant (pas de poussées de croissance), un requin du Groenland adulte pourrait théoriquement avoir bien plus de 500 ans.

La longévité présumée mais hypothétique du requin du Groenland a apparemment été confirmée dans une étude² publiée en août 2016 par une équipe scientifique dirigée par Julius Nielsen de l’Université de Copenhague. Selon l’article publié dans la revue Science, les scientifiques ont utilisé la datation au radiocarbone pour établir l’âge de 28 requins du Groenland. Les tranches d’âge des requins nés avant les essais de la bombe atomique dans les années 1950—qui ont presque doublé la quantité de carbone 14 dans l’atmosphère—ont révélé une espérance de vie d’au moins 272 ans, la maturité sexuelle pouvant ne pas être atteinte avant 156 ± 22 ans , et que le plus grand requin (5,2 m) avait 392 ± 120 ans. Considérant que la plus grande longueur connue du requin du Groenland est de plus de sept mètres, il pourrait y avoir des spécimens vivants qui nageaient dans le Saint-Laurent lorsque Jacques Cartier a revendiqué la Nouvelle-France en 1534. Bien que le débat scientifique sur cette découverte puisse s’attarder pendant des années—la datation au radiocarbone des organismes marins vivant en profondeur n’est pas très précise—, il est sûr de dire que même avec la marge d’erreur la plus conservatrice, le requin du Groenland est actuellement et de loin le vertébré qui vit le plus longtemps sur la planète.

¹ Hansen, P. M. (1963). Tagging experiments with the Greenland shark (Somniosus microcephalus (Bloch and Schneider)) in subarea 1. Int. Comm. Northwest Atl. Fish. Spec. Publ. 4, 172–175.
² Nielsen, J., Hedeholm, R. B., Heinemeier, J., Bushnell, P. G., Christiansen, J. S., 2815 Olsen, J., et al. (2016). Eye lens radiocarbon reveals centuries of longevity in the Greenland shark (Somniosus microcephalus). Science 353, 702–704.

PARASITES

PARASITES

Le parasite le plus souvent associé au requin du Groenland est le copépode Ommatokoita elongata. Il s’agrippe à l’un ou aux deux yeux du requin, ce qui provoque des lésions de la cornée et peut rendre le requin partiellement aveugle. Cependant, même s’il était complètement aveugle, le requin du Groenland pourrait facilement survivre en utilisant ses autres sens pour détecter et localiser ses proies.

De plus, comme le requin vit à grande profondeur et souvent sous la glace, son habitat est normalement dépourvu de lumière, ce qui rend ses yeux inutiles. Certains chercheurs pensent que le copépode est bioluminescent et sert à attirer les proies du requin mais cela n’a jamais été prouvé. Il est intéressant de noter que si plus de 90 % de la population arctique du requin du Groenland est parasitée par le copépode¹, moins de 5 % des requins rencontrés par les chercheurs du GEERG dans le Saint-Laurent² étaient des hôtes d’Ommatokoita elongata.

En 2004³, Jeffrey Gallant, chercheur au GEERG, a observé une lamproie marine (Petromyzon marinus) parasitant un requin du Groenland près de Baie-Comeau, dans l’estuaire du Saint-Laurent.

¹ Koefoed E (1957) Notes of the Greenland shark Acanthorhinus carcharias (Gunn). 2. A uterine foetus and the uterus from a Greenland shark. Rep Nor Fish Mar Investig 11:8–12.
² Harvey-Clark, C. J., Gallant, J. J., and Batt, J. H. (2005). Vision and its relationship 2612 to novel behaviour in St. Lawrence River Greenland Sharks, Somniosus microcephalus. Can. Field Nat. 119, 355–358.
³ Gallant, J., C. Harvey-Clark, R.A. Myers, and M.J.W. Stokesbury. 2005. Sea lamprey (Petromyzon marinus) attached to a Greenland shark (Somniosus microcephalus) in the St. Lawrence Estuary, Canada. Northeastern Naturalist. 2006 13(1):35–38.
(CI-DESSUS) Le parasitisme oculaire observé par l’ORS dans le Saint-Laurent, comme dans la vidéo qui précède, est inférieur à 5 %. Les yeux de la plupart des requins ne montrent aucun signe d’activité parasitaire (passée ou présente) (© ORS | Jeffrey Gallant). (CI-DESSOUS) Lamproie marine (Petromyzon marinus) accrochée entre les ptérygopodes d’un requin du Groenland mâle dans l’estuaire du Saint-Laurent (© ORS | Jeffrey Gallant).

TOXICITÉ

TOXICITÉ

L’eau et les solutés dissous, y compris divers sels, chlorure de calcium et sulfates, traversent le corps d’un poisson (cellules, tissus et organes) dans un processus appelé osmose. Les molécules plus grosses présentes dans le sang et les liquides tissulaires des poissons et des requins, notamment les protéines et l’oxyde de triméthylamine (TMAO*), exercent également un effet osmotique contributif, mais elles sont trop grosses pour passer par les canaux qui régissent l’équilibre salin.

* Sous-produit de la dégradation métabolique des protéines et des acides aminés.

Si la concentration de sel dans les tissus d’un poisson est inférieure à celle de l’eau environnante, son corps absorbera le sel de l’environnement jusqu’à ce que les deux niveaux deviennent égaux. Si un poisson marin remonte une rivière d’eau douce à la nage, le phénomène inverse se produira et il diffusera du sel dans l’environnement via des cellules spécialisées sécrétant du sodium situées principalement dans les tissus branchiaux. Dans les deux cas, trop ou trop peu de sel est préjudiciable à la plupart des espèces de poissons car ils ne peuvent survivre que dans une plage spécifique de concentrations. Les poissons qui sont ainsi limités à l’eau douce ou à l’eau de mer sont appelés sténohalins. Certaines espèces, comme le saumon, sont capables d’osmoréguler à différents niveaux de salinité. Ces poissons sont appelés euryhalins.

Lorsque le sel et d’autres solutés pénètrent dans les tissus d’un poisson, ils expulsent l’eau du corps. Étant donné que les niveaux de sel des poissons marins sont inférieurs à ceux du milieu environnant, ils doivent continuellement absorber de l’eau et excréter du sel par leurs branchies. Les niveaux de sel chez les requins sont également inférieurs à ceux de l’eau de mer, mais les requins gèrent l’osmose différemment. Afin de maintenir une quantité d’eau stable dans son corps, le requin du Groenland va retenir une forte concentration d’urée dans son sang, compensant ainsi pour des concentrations de sel plus faibles. Cependant, comme des niveaux élevés d’urée toxique endommagent son corps en déstabilisant les protéines, le requin du Groenland conserve également des niveaux encore plus élevés d’oxyde de triméthylamine pour contrer les effets néfastes de l’urée. Lorsque l’oxyde de triméthylamine et l’urée sont combinés avec le sel dans les tissus du requin, la pression osmotique des fluides corporels du requin est supérieure à celle de l’eau environnante. En d’autres termes, le requin est « plus salé » que l’eau de mer. Contrairement aux poissons osseux qui doivent constamment absorber de l’eau pour remplacer l’eau perdue par osmose, le requin du Groenland n’a pas besoin de dépenser de l’énergie pour maintenir des niveaux d’eau vitaux dans son corps.

En plus de contribuer à la pression osmotique du requin, l’oxyde de triméthylamine et des niveaux élevés d’urée servent également d’antigel naturel en stabilisant les enzymes et les protéines dans les tissus du requin du Groenland. Lorsque le requin rencontre des conditions extrêmement profondes et froides, cela empêche la formation de cristaux de glace qui perturbent les parois cellulaires et provoquent la fuite du contenu cellulaire, ce qui entraîne des lésions des tissus et des organes, puis la mort.

Lorsque la chair de requin du Groenland est consommée, le processus de digestion transforme l’oxyde de triméthylamine (TMAO) en triméthylamine (TMA), une substance qui sent l’ammoniaque et le poisson pourri. En plus de provoquer de l’inconfort intestinal, la triméthylamine a également des effets neurologiques indésirables similaires à la consommation de quantités excessives d’alcool. La mort peut s’ensuivre dans des cas extrêmes lorsque trop de chair de requin a été consommée. La chair de requin du Groenland est néanmoins considérée comme un mets délicat en Islande. Voir la section « Pêcheries » ci-dessous.

ATTAQUES

ATTAQUES

Selon le Registre canadien des attaques de requins, le requin du Groenland a été impliqué ou suspecté dans quatre incidents confirmés avec des humains au Canada. Jusqu’en 2023, la plupart des affrontements ont impliqué la traque de personnes sur le rivage, en bateau ou en plongée. Aucun n’a entraîné d’attaque ou de blessure.

Il est important de noter que le requin du Groenland se trouve normalement dans des eaux si profondes et inhospitalières pour les humains que la plupart ne rencontreront jamais un nageur ou un plongeur de toute leur vie. Il serait donc très imprudent de qualifier le requin d’inoffensif pour l’homme sur la seule base des quelques statistiques existantes. Lors des rencontres du GEERG dans l’estuaire du Saint-Laurent, des requins ont été observés quittant le fond pour enquêter sur les activités de plongeurs en surface. Dans un cas, un requin a suivi une équipe de plongeurs jusqu’à la surface à la fin d’une plongée. Ces deux circonstances pourraient indiquer une reconnaissance visuelle par un prédateur de phoque expérimenté. Une autre démonstration de la capacité du requin à tendre une embuscade à des proies vivantes a été expérimentée de première main par les chercheurs du GEERG Harvey-Clark et Gallant lors d’une rencontre de très près dans une visibilité nulle et des eaux peu profondes (5 m) en juin 2004.

Bien que les événements suivants ne soient en aucun cas des attaques, des milliers de victimes de naufrages et de guerres dans l’Atlantique Nord et le Saint-Laurent, y compris l’Empress of Ireland, ont peut-être été consommées par le requin du Groenland qui plane constamment juste au-dessus du fond marin à la recherche de nourriture.

¹ Gallant, J. (2022. July 26)Canadian Shark Attack Registry (1st ed.). St. Lawrence Shark Observatory. https://geerg.ca/en/shark-attacks
Impératrice déchue (Huile sur toile) © Jean-Louis Courteau. Le tableau de Courteau montre comment l’Empress of Ireland a pu apparaître quelques semaines après son naufrage. Une vue aussi large de l’épave nécessiterait des conditions environnementales extraordinaires puisque la visibilité sur l’Empress of Ireland est généralement médiocre, dépassant rarement les six mètres. L’opportuniste requin du Groenland se dirigeant vers l’odeur de la mort était probablement un visiteur fréquent de l’épave dans les mois qui ont suivi la catastrophe.

PÊCHERIES

PÊCHERIES

Dans certains pays, le requin du Groenland est encore chassé commercialement pour son huile. Entre la seconde moitié du XIXe siècle et 1960, les pêcheurs du Groenland et d’Islande ont capturé jusqu’à 50 000 requins par an. L’huile contient de la vitamine A et était utilisée pour allumer des lampes.

La chair du requin contient tellement d’urée et de TMAO (oxyde de triméthylamine) qu’elle doit subir un processus long et désagréable avant de pouvoir être donnée aux chiens de traîneau. En renonçant au processus, les chiens entrent dans un état d’ébriété appelé « shark sick ». Des niveaux élevés d’intoxication entraînent des convulsions, voire la mort.

Préparation de la chair de requin du Groenland au musée des requins de Bjarnahöfn, en Islande.

En Islande, la viande de requin putréfiée est transformée pour la consommation humaine en la comprimant dans un grand récipient perforé—la viande n’est plus enfouie comme jadis dans le gravier pendant 6 à 12 semaines—pour éliminer les fluides toxiques, puis elle est suspendue pour sécher à l’extérieur pendant 2 à 4 mois. Elle est ensuite coupée en cubes de la taille d’une bouchée et servie comme hors-d’œuvre appelé hákarl ou kæstur hákarl. La majeure partie du hákarl produit en Islande provient du musée des requins Bjarnahöfn, qui utilise des prises accessoires de requins du Groenland.

La gâterie savoureuse est traditionnellement accompagnée d’un coup de Brennivín, l’eau de feu locale.

CONTREVERSE DU TIRE-BOUCHON

CONTROVERSE DU TIRE-BOUCHON

L’île de Sable (Nouvelle-Écosse) et maintenant la mer du Nord (Angleterre et Écosse) sont mûres avec la controverse entourant le requin du Groenland. Il a longtemps été suggéré que l’île de Sable est un terrain de chasse aux requins en raison de l’apparition régulière de carcasses de phoques mutilées. De nombreuses victimes présentent une coupure en forme de tire-bouchon qui se tord sur toute la longueur du corps du phoque. Cette blessure particulière est considérée par certains comme étant le résultat d’une attaque de requin du Groenland. Des rapports similaires ont commencé à émaner du Royaume-Uni à l’été 2010. Après de nombreuses analyses et débats, nous ne pensons pas que le requin du Groenland soit responsable de ces soi-disant « tire-bouchons ». Les preuves environnementales et comportementales avancées ne concordent aucunement avec nos propres conclusions qui sont basées en partie sur des données de télémesure et sur l’observation de première main du requin du Groenland sous l’eau. De plus, certaines conditions environnementales normalement associées à la distribution du requin du Groenland n’existent pas à l’un ou l’autre endroit.

Dans certaines conditions, les carcasses de phoques qui échouent à l’île de Sable sans la blessure caractéristique du tire-bouchon peuvent avoir été attaquées ou tuées par le requin du Groenland. Les corps de phoque mutilés sont plus typiques de la prédation par le requin blanc, ce qui se produit certainement à l’île de Sable. Le seul patron de morsure confirmé pour le requin du Groenland est circulaire. Le requin du Groenland mord dans sa victime puis se tord à plusieurs reprises jusqu’à ce qu’un « bouchon » de chair soit arraché. Il est possible qu’un grand phoque—ou même un cétacé—survive à une telle attaque.

Phoques gris (Halichoerus grypus) à l’île Brion. La base mutilée des nageoires postérieures du phoque de droite montre une morsure profonde typique d’un requin blanc (Carcharodon carcharias), connu pour être abondant et actif à cet endroit. Photo © ORS | Jeffrey Gallant
Incident de cannibalisme du phoque gris (Halichoerus grypus) à l’île Brion. Capture d’écran vidéo © ORS | Jeffrey Gallant | Tous droits réservés

La blessure en tire-bouchon ne correspond tout simplement pas au mode d’alimentation connu du requin du Groenland : un mode qui a été observé et filmé. On pense maintenant que les coupables sont les phoques eux-mêmes, comme cela a été observé en Nouvelle-Écosse (1993)¹, en Écosse (2016)², et lors de notre expédition au requin blanc aux îles de la Madeleine en 2023.

¹ Bédard, C., Kovacs, K. and Hammill, M. (1993). Cannibalism by grey seals, Halichoerus grypus, on Amet Island, Nova Scotia. Marine Mammal Science, 9: 421-424. https://doi.org/10.1111/j.1748-7692.1993.tb00474.x
² Brownlow A, Onoufriou J, Bishop A, Davison N, Thompson D. (2016). Corkscrew Seals: Grey Seal (Halichoerus grypus) Infanticide and Cannibalism May Indicate the Cause of Spiral Lacerations in Seals. PLoS ONE 11(6): e0156464. doi:10.1371/journal.pone.0156464

RELATION AVEC LES HUMAINS

RELATION AVEC LES HUMAINS

Contrairement à la vénération divine pour les requins qui prévaut dans le Pacifique Sud, les Occidentaux n’apprécient guère ces monstres à dents. Généralement perçus comme des machines à tuer sans discernement, ce n’est généralement pas le cas du requin du Groenland, du moins pas par certains pêcheurs qui l’appellent par dérision le « requin de fond » et le considèrent comme totalement inoffensif.

Les Inuits ont longtemps séché la peau du requin du Groenland pour fabriquer des bottes et ils ont utilisé ses dents pour couper les cheveux. Les marins utilisaient sa peau recouverte de denticules sous leurs bottes pour éviter de glisser sur les ponts en bois humides.

Encore aujourd’hui, certains pêcheurs le considèrent comme un ravageur qui endommage leurs filets et qui contribue au déclin des stocks de poissons. Ayez pitié du requin attrapé par ces pêcheurs qui lui coupent la nageoire caudale et le jettent par-dessus bord pour une mort certaine, inutile, et illégale.

La perception générale du public sur les requins n’est pas beaucoup mieux. Grâce à des documentaires et des films sensationnalistes tels que « Les dents de la mer », qui ont largement prévalu jusqu’à récemment, peu de gens ont de la sympathie pour les requins, bien que la plupart regardent avec admiration la vue de cette bête accrochée à un hameçon sur le quai de pêche. Qu’ils le veuillent ou non, peu d’animaux génèrent autant de frénésie médiatique et de véritable fascination. L’Observatoire des requins du Saint-Laurent vise à renverser cette tendance sans fondement et destructrice grâce à ces recherches novatrices et à la sensibilisation du public.

PLONGER AVEC LE REQUIN DU GROENLAND

PLONGER AVEC LE REQUIN DU GROENLAND

En date de 2023, il existe très peu d’endroits connus dans le monde où il est possible de plonger avec le requin du Groenland nageant librement dans des conditions naturelles, c’est-à-dire lorsque le requin n’est pas appâté ou capturé.

Plonger avec des requins qui ont été capturés à la ligne puis attachés par la queue n’est en aucun cas considéré comme naturel. Cette pratique peut en effet blesser, voire tuer des requins.

Des centaines de rencontres naturelles ont eu lieu à Baie-Comeau, au Québec, entre 2003 et 2012. D’autres rencontres naturelles ont également été signalées ailleurs dans le Saint-Laurent, dans le fjord du Saguenay et à Qaanaaq, au Groenland.

Plongeur et requin du Groenland dans l’estuaire du Saint-Laurent. Photo © ORS | Jeffrey Gallant

LÉGENDES INUITES

LÉGENDES INUITES

Skalugsuak

Skalugsuak

Les tissus du requin du Groenland ont une forte teneur en urée, ce qui a donné naissance à la légende inuite de l’origine du requin : une vieille femme lavait ses cheveux avec de l’urine et les essuyait avec un chiffon. Le tissu soufflé dans la mer par le vent est devenu Skalugsuak, le premier requin du Groenland.

Sedna

Sedna

Lorsqu’une jeune fille inuk a dit à son père qu’elle voulait épouser un oiseau, il a tué son fiancé et jeté sa fille à la mer depuis un kayak. Quand elle s’est accrochée au côté, il a coupé chacun de ses doigts jusqu’à ce qu’elle lâche prise. Sedna a glissé dans les profondeurs où elle est devenue la Mère de la Mer. Ses doigts se sont transformés en divers mammifères marins, dont le morse, le phoque et la baleine boréale. Bien qu’il ne s’agisse pas d’un doigt de Sedna, le requin du Groenland reste proche de Sedna. En raison de son odeur forte, on dit que le requin vit dans le pot à urine de Sedna. On lui confia aussi le devoir de venger la déesse et un jour, il fit chavirer le kayak du père alors qu’il pêchait et il le dévora. Lorsqu’un Inuk meurt de cette façon, on dit que le requin a été envoyé par Sedna. À Pangnirtung, le requin du Groenland est associé au corbeau car il se nourrit des restes de nourriture laissés par des prédateurs plus redoutables comme l’orque (épaulard).

Arnakuagsak

Arnakuagsak

La déesse inuite Arnakuagsak—vieille femme de la mer—est l’équivalent groenlandais de la déesse inuite canadienne Sedna. Au Groenland, le requin est perçu comme un esprit aidant les chamans.

La déesse inuite Arnakuagsak—vieille femme de la mer—est l’équivalent groenlandais de la déesse inuite canadienne Sedna. Statue d’Arnakuagsak à Nuuk, Groenland. Photo © ORS | Jeffrey Gallant

RÉFÉRENCES HISTORIQUES

RÉFÉRENCES HISTORIQUES

Nous avons trouvé de nombreuses références documentées de requins du Groenland dans le Saint-Laurent et le fjord du Saguenay remontant aussi loin que le début des années 1800.

En 1922, l’équipage d’un bateau de chasse terre-neuvien coincé dans la glace a capturé plus de 30 requins du Groenland après les avoir attirés à la surface en vidant les fonds de graisse et de sang de phoque. Les requins retirés de l’eau avec des gaffes mesuraient entre 3,7 m et 4,9 m. De nombreuses autres histoires racontent des expériences similaires.

Lorsque les bélugas étaient encore chassés sur le Saint-Laurent, des dizaines de requins du Groenland étaient souvent attirés vers les lieux de mise à mort à marée haute où les baleines étaient éventrées et saignées à mort dans des villes comme Bergeronnes. À mesure que la marée descendait, les requins s’échouaient sur les hauts-fonds pour aussi être éventrés par les pêcheurs afin d’extraire leur foie pour l’huile. À marée haute, on raconte même que certains requins meurtris mais encore vivants auraient réussi à nager jusqu’à l’océan…

STATUT

STATUT

Le requin du Groenland est répertorié comme quasi menacé par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).

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Mal représentés et mal compris, les requins jouent un rôle essentiel dans les écosystèmes de l'Atlantique Nord, mais ils sont de plus en plus menacés en raison de leur mauvaise réputation, de la pollution et du manque de sensibilisation du public. Faites un don pour nous aider à étudier et à protéger les requins du Saint-Laurent et du Canada atlantique avant qu'il ne soit trop tard.Les dons à l'ORS/GEERG, une oeuvre de bienfaisance enregistrée et entièrement bénévole, sont déductibles d'impôts au Canada.
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« La peur et l'indifférence mordent plus profondément que tout requin. »— Jeffrey Gallant, Observatoire des requins du Saint-LaurentDéductible d'impôts au Canada
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