REGISTRE CANADIEN DES ATTAQUES DE REQUINS

Un requin du Groenland traque un bateau à l’île aux Basques

Numéro de cas : 16
Date : 1940-04-04
Lieu : Île aux Basques, Québec
Type d’incident : Bateau traqué par un requin — Code : TR
Espèce (Confirmée): Requin du Groenland (Somniosus microcephalus)
Cause(s) possible(s) : Sang dans l’eau (Provoqué)
Résultat : Nul
Statut : Confirmé
Description : Un requin aurait¹ traqué et attaqué un bateau à mi-chemin entre Trois-Pistoles et l’île aux Basques. Le gardien de l’île, Charles Morency, se dirigeait vers l’île dans un canot* en transportant la carcasse d’un animal mort qu’il voulait donner à manger aux renards de l’île. Selon M. Morency, une traînée de sang qui s’était formée dans l’eau chargée de glace derrière le bateau aurait attiré un requin de quatre mètres, qui a suivi puis tenté de faire chavirer le bateau. Le requin est apparu pour la première fois à des centaines de pieds derrière le canot avant de nager rapidement pour le rattraper. Il aurait provoqué une telle vague lorsqu’il a fait surface juste à l’arrière qu’il a presque fait chavirer le canot. Il a plongé deux fois de plus le long du bateau avant de soulever le canot hors de l’eau dans une tentative infructueuse de le renverser. Il serait finalement réapparu devant le canot avant de partir.

Référence d’origine² :

Tout dernièrement. M. Charles Morency, gardien du domaine aquatique de la société Provencher d’Histoire naturelle de Québec, lequel comprend l’Ile-aux-Basques et les deux Razades, a été le héros d’une aventure dont il se souviendra longtemps. Il se dirigeait dans son canot vers l’Ile-aux-Basques, portant à sa poupe le cadavre d’un petit animal dont le sang coulait dans le sillage du canot et qu’il destinait à la nourriture des renards de l’île. M. Morency naviguait lentement lorsqu’il aperçut à quelques centaines de pieds en arrière de son bateau un animal marin qu’il prit pour un marsouin. La bête plongeait, puis réapparaissait dans le sillage, s’approchant avec rapidité de l’embarcation. À une couple de cents pieds de celle-ci, l’animal fit un plongeon et alla sortir à l’arrière, si près que le gardien eut peine à empêcher son canot de chavirer. Après un nouveau plongeon, il reparut à côté du canot, replongea encore puis tenta de sortir juste sous le canot qu’il souleva mais sans le renverser. Il sortit enfin à l’avant pour tout de suite disparaître. M. Morency reconnut que l’animal, qui avait une longueur de 12 pieds, était un requin bleu, sa peau étant gris-bleue avec une gueule typique du genre. Le gardien des Razades, pêcheur expérimenté, qui a déjà capturé des requins dans le golfe avec ses frères, a avoué cependant que, pris au dépourvu cette fois, ce fut la première occasion où un poisson lui avait fait peur. D’où venait ce monstre perdu dans nos parages ? — Une histoire de requins. Le Progrès du Golfe. 06.06.1941

Évaluation : M. Morency, un pêcheur expérimenté qui avait auparavant capturé de nombreux requins dans le golfe du Saint-Laurent, a identifié l’agresseur comme étant un requin bleu. Cependant, seul le requin du Groenland aurait pu être présent à cet endroit† particulier en eau peu profonde (<6 m) et glacée au début d’avril. Bien qu’un requin du Groenland aurait pu être attiré par le sang, il n’aurait probablement pas eu l’intention ni la capacité physique de renverser le bateau. De plus, avec une vitesse de croisière moyenne³ de 0,3 m/s, un requin du Groenland n’aurait pas pu rattraper le bateau sur une distance de plusieurs centaines de pieds, et encore moins produire une vague assez forte pour le faire basculer. Nous avons donc déterminé que l’animal en question était probablement un requin du Groenland, mais que certains détails de l’incident ont probablement été mal interprétés ou délibérément exagérés.

Notes:
* On ne sait pas s’il s’agissait d’un canot ou du bateau de service motorisé beaucoup plus grand qui était normalement utilisé pour se rendre à l’île.
† Il n’existe aucune observation vérifiée du requin bleu (Prionace glauca) à l’ouest de Grande-Vallée, qui se trouve à 343 km (185 mn) en aval de Trois-Pistoles.

 Cliquez ici pour les recommandations aux plaisanciers.
Références :
¹ Poursuivi par un requin. Le Soleil, Québec. April 11 1940.
² Une histoire de requins. Le Progrès du Golfe. 06.06.1941.
³ Gallant, Jeffrey J., Marco A. Rodríguez, Michael J. W. Stokesbury, and Chris Harvey-Clark. (2016). Influence of environmental variables on the diel movements of the Greenland Shark (Somniosus microcephalus) in the St. Lawrence Estuary. Canadian Field-Naturalist 130(1): 1-14.
(Arrière-plan) Bateau au service de la société Provencher à l’Île aux Basques, 1946, BAnQ Québec, Fonds Ministère de la Culture et des Communications, (03Q,E6,S7,SS1,P32275), Paul Carpentier.
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Mal représentés et mal compris, les requins jouent un rôle essentiel dans les écosystèmes de l’Atlantique Nord, mais ils sont de plus en plus menacés en raison de leur mauvaise réputation, de la pollution et du manque de sensibilisation du public. Faites un don pour nous aider à étudier et à protéger les requins du Saint-Laurent et du Canada atlantique avant qu’il ne soit trop tard.Les dons à l’ORS/GEERG, une oeuvre de bienfaisance enregistrée et entièrement bénévole, sont déductibles d’impôts au Canada.
Agence de revenu du Canada : 834462913RR0001« La peur et l’indifférence mordent plus profondément que tout requin. »— Jeffrey Gallant, Observatoire des requins du Saint-LaurentDéductible d’impôts au Canada
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